Ringuet
Trente arpents Genre de texte Contexte
Euchariste Moisan, propriétaire d’une terre, conserve pendant plusieurs semaines son foin en grange afin de le vendre au meilleur prix possible. Cependant, une nuit, la grange et son contenu brûlent, ce dont rêve au même moment Euchariste dans son sommeil agité. Notes Texte témoin
Édition critique : Trente arpents, Panneton, Jean, avec la collaboration de Roméo Arbour et Jean-Louis Major, Montréal, les Presses de l'Université de Montréal, Bibliothèque du nouveau monde, 1991, 519 pages.
roman
Ce rêve se trouve dans le cinquième chapitre de la partie intitulée «Automne».
Phydime Raymond : propriétaire de la terre adjacente à celle d’Euchariste Moisan. Les deux voisins entretiennent une relation houleuse, empreinte de jalousie.
30 arpents, Paris, Flammarion, 1938, p. 198.
Un incendie bien réel
Une nuit, Euchariste rêva qu’il habitait le village où se déclarait un incendie. Tous les gens, parmi lesquels il retrouvait des voisins, feu l’oncle Ephrem, l’autre Ephrem, son fils, et des vieux qu’il ne pouvait reconnaître, tous s’étaient mis à faire la chaîne et tentaient d’éteindre les flammes en y versant des seaux qu’ils ignoraient vides. Il fallait le leur dire et il y courait lorsque Phydime se mit en traverse, l’empêchant de passer. Ils luttaient de toute leur force, lui hurlant, l’autre l’écrasant de son poids dans un nuage de fumée qui les suffoquait. Il étouffait au point qu’il se trouva subitement assis dans son lit, tout en nage, réveillé brutalement par le cri terrible qu’il venait de pousser.
Il n’y avait pas de fumée dans la chambre et l’aurore rougeoyait. Il se réveilla tout à fait et, soudain, bondit.
Un torrent de lumière sanglante coulait de la fenêtre et accrochait des reflets pourpres aux angles des meubles. A ce moment, des coups éperdus ébranlèrent la porte à l’enfoncer.
La grange brûlait magnifiquement, tout d’une pièce dans la nuit, avec un ronron sonore de bête contente et des éclatements comme des fusées.