Albrecht Dürer

Allemagne   1525

Genre de texte
Journal

Contexte
Ce rêve est extrait du Journal de Dürer. La page du journal au format 30 x 43 cm se trouve à Vienne, au Kunsthistorisches Museum.

Notes
Nous reproduisons la traduction que donne Marguerite Yourcenar dans Le temps, ce grand sculpteur, Paris : Gallimard, 1983, p. 69-73.

Commentaires
Pour Marguerite Yourcenar, «Ce rêve frappe par une absence totale de symboles. [...] Dans son croquis onirique, le visionnaire est un réaliste, et c'est d'un drame cosmique qu'il est le spectateur. Sa précision est d'un physicien. Dès le choc de la première trombe d'eau, il a essayé de mesurer à quelle distance il se trouvait du point de frappe, et d'évaluer les autres par rapport à celui-là. Il a tenu compte de l'apparente lenteur, puis de la vitesse vertigineusement accrue, de ces coulées issues de très haut. Chose rare, à ma connaissance, dans un rêve, il a senti la secousse et entendu le tonnerre des chutes d'eau.»




Journal de Dürer

La Vision

Dürer, La Vision

La nuit du mercredi au jeudi après la Pentecôte [7-8 juin 1525], je vis en rêve ce que représente ce croquis : une multitude de trombes d’eau tombant du ciel. La première frappa la terre à une distance de quatre lieues : la secousse et le bruit furent terrifiants, et toute la région fut inondée. J’en fus si éprouvé que je m’éveillai. Puis, les autres trombes d’eau, effroyables par leur violence et leur nombre, frappèrent la terre, les unes plus loin, d’autres plus près. Et elles tombaient de si haut qu’elles semblaient toutes descendre avec lenteur. Mais, quand la première trombe fut tout près de terre, sa chute devint si rapide et accompagnée d’un tel bruit et d’un tel ouragan que je m’éveillai, tremblant de tous mes membres, et mis très longtemps à me remettre. De sorte qu'une fois levé, j'ai peint ce qu'on voit ci-dessus. Dieu tourne pour le mieux toutes choses.

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